De la gestion difficile de l'absence de répartie...
Bon,
j'ai toujours pas fini mon nouvel opus (ben quoi, on dit pas ça en couture ?), mais je voulais vous confier quelque chose de grave. Il se trouve que je n'ai pas été taguée pour vous raconter ma vie intime, mais quand même, c'est trop pour moi, il faut que je vous laisse porter le fardeau, vous, aussi.
En fait voilà, mon problème, dans la vie, c'est que je n'ai aucune répartie. Et c'est dur à vivre au quotidien, parce que, comme tout un chacun, il m'arrive des trucs, et je réponds jamais du tac au tac le truc cinglant qui fait mouche. Souvent, d'ailleurs, je réponds rien. Même des fois, je souris. Bêtement. Et à chaque fois je me dis après : 'ah ah, et j'aurais pu répondre ça, et ça aussi, hé hé, trop malin, comme ça lui aurait claqué le beignet, wahou, génial'. Et je ricane, je ricane bien même. Tellement je ricane, je me dis, c'est dommage de pas en faire profiter les autres. Même j'en parle aux gens, du coup je raconte les trucs en insérant mes commentaires a posteriori. Des fois, aussi, je fais ça devant le miroir de la salle de bain, avec le prétexte de 'je me brosse les dents, normal que je sois là'. Mais là c'est vraiment la honte - et je vous le raconte, parce qu'on se connait pas - , parce que non seulement se faire des films toute seule dans la salle de bain c'est narcissique, mais c'est surtout trop tard, car les situations qui prêtent à la bonne répartie n'arrivent jamais dans la salle de bain...
Elles arrivent par hasard, spontanément, au boulot par exemple...
Scène 1: boulot, intérieur. Bureau de mes 2 collègues, juste derrière le gros mur de briques rouges.
Précédents : on n'avait jamais été très proches, mais entre collègues,
c'était quand même un peu de cohabitation, tant bien que mal,
sandwiches joyeusement dévorés dans la salle du microonde le midi,
conseils échangés quant au reflux gastro-œsophagien du petit dernier -
tiens, à cet occas', Laurence Pernoud avait même changé de domicile
pendant quelques mois -, bref, pas la chaude passion, mais des moments
partagés. Ca c'était y'a plusieurs mois. Après, y'a eu les découvertes
des engagements politiques de ces deux hurluberlus (- H1- et -H2-,
j'ai mis des codes couleurs pour une meilleure compréhension), et une
nette mise à distance : on ne les voyait plus, et on ne s'en portait
pas plus mal. Ambiance électorale oblige, la salle du microonde
continuait à être un haut lieu de partage de nos convictions, à nous,
les autres, et un moment de réaffirmation de notre identité collective,
ratissant large, mais nous permettant de nous offusquer et de faire
preuve de la plus vive intolérance, moi la première ("Je suis choquée,
je suis choquée" ne cessais-je de répéter).
Donc, déroulement, hier matin : J'arrive (pour frimer avec ma nouvelle
robe, j'avoue, bien mal m'en a pris) histoire de leur dire un bonjour,
étant donné que tout le bâtiment est vide et que je n'ai personne
d'autre à aller saluer (et à aller épater avec ma nouvelle robe. Pffff,
narcissisme à la con !).
H1 : on est en réunion de campagne ! Hi hi
[puisque tous les deux se présentent dans leurs villes respectives sur
leurs listes respectives. D'où mes cris d'orfraie "I am shocked, I am
shocked"]
moi: hé.
H2 : tu sais que je me présente sur la liste UMP de [Pétaouchnok] ?
moi: hmmmm, tout le monde le sait.
H2: ah ouais ?
moi : ouais, hmmmm [regard au sol, genre, 'abrégeons cette discussion, tu sais bien ce que j'en pense']
H2 : [ricane] Je dois passer pour un horrible sarkoziste ?
moi :...
H1 : [essayant d'arrondir les angles tout
en soutenant son camarade politique...] eh ben en plus on a bien le
droit d'être à l'UMP et de pas être sarkoziste !
H2 : mais je suis sarkoziste !
moi :...
H1 : ah ben... ouais, aussi, ouais, on a le droit !
Vous notez, mes réparties de folie ! genre vraiment je les ai explosé en vol ! Surtout que bon, c'était pas prendre trop de risque de leur dire ce que j'en pensais : non seulement ils le savaient pertinemment, mais c'est à quoi ils s'exposent en se présentant sur une liste électorale, c'est leur boulot !!!
Bon, après je me suis moquée un peu quand même, à savoir s'ils avaient été convaincre la populace sur leurs marchés respectifs ("non, nous on ne fait pas ça, on est la matière grise du parti..." et moi "...", une fois de plus, très très fort !), et j'ai fini en racontant ma rencontre avec un chouette type tête de liste LO au marché du bled pas loin, et en clamant que c'est ça qu'il fallait faire, être à Lutte ouvrière et bosser comme ouvrier à Toyota. Et puis j'ai filé dans mon bureau. Ça m'apprendra tiens.
D'autant que pour finir, j'ai cru déceler de l'ironie dans leurs remarques sur ma jolie robe, et de toutes façons, tout me semblait définitivement faussé et something was rotten in the kingdom of Danemark, et ailleurs aussi.
Donc face à cette gestion désastreuse du temps présent, j'ai décidé d'agir. Dorénavant, je suis en mode action-réaction. Que ce blog soit un lieu de création couturesque ou culinaire n'enlève rien à sa vertu thérapeutique et politique, et il est temps d'arrêter de ronchonner et de commencer à battre la mesure.
A bat la paresse et le désistement, vive la répartie cinglante ! Qu'ici soient consignés mes élans spontanés, mes réponses bafouillées et mes bégaiements ridicules, mes moments de jubilation et mes ratages [que je pressens bien plus nombreux que les premiers...], rouge au joue et sueur au front, s'il le faut !
Ah ah ah. On va rire.
A suivre...